Ego en souffrance

Recevoir un chef étoilé Michelin à sa table, ça demande de la réflexion, de l’imagination et de la modestie. Quels que soient vos talents culinaires, il y a peu de chance que vous réalisiez un plat à sa hauteur, sur son propre terrain. Le truc ? Une bonne spécialité exotique. Quelque chose qui n’est pas dans ses tablettes et il se régalera à manger quelque chose d’inhabituel.

Chercher à rivaliser avec un champion lorsqu’on est amateur montre le besoin de briller, d’appartenir à une caste enviée et reconnue. Cela révèle une blessure profonde de l’égo.

Je me souviens d’un voyage en Thaïlande. Nous étions un petit groupe de trois couples réunis par le hasard des réservations. Parmi nous, un, si ce n’est LE physicien nucléaire mondial. Une aubaine pour les curieux qui ne cherchent qu’à apprendre. L’occasion de se ridiculiser pour celui qui a tant besoin d’être reconnu qu’il étalera sa science, pourtant inexistante. Ce qui fait illusion devant un parterre de novices, ne tient pas la route devant un expert.

Paradoxalement, le besoin infini de reconnaissance, d’existence même, mettra en situation de grande humiliation. Une blessure initiale sera alors réactivée à chaque occasion, recréant ainsi ce qu’on cherche tant à effacer de son souvenir ou de ses ressentis. Il en sera de même pour son épouse qui en s’alliant à ce type d’homme, vivra l’humiliation par personne interposée.

L’humiliation, tout comme les autres blessures, est la plupart du temps réactualisée par la personne-même qui cherche à la fuir.

C’est une tentative inconsciente d’affronter le problème, de remettre sans cesse l’ouvrage sur le métier. Ajouter de la conscience à la démarche permettra enfin de sortir de ce cercle vicieux.