Hypocrisie de circonstance
Le soufflé commence à retomber très légèrement et les polémiques démarrent. Une fois le premier engouement passé, une fois la grande communion émotionnelle estompée, quelques voix timides s’élèvent. Aussitôt attaquées. Crime de lèse-majesté, de lèse-solidarité.
Et la liberté d’expression dans tout ça ? Elle est où ?
Juste dans le soutien indéfectible à un organe de presse moribond parce qu’en manque de lecteurs ? Que Charlie Hebdo devienne un symbole, soit. Qu’il devienne intouchable à l’instar des martyrs du passé, soit. Que ce drame est tout simplement intolérable, c’est acquis.
Qu’il attire à lui toute l’hypocrisie d’un pays voire du monde, je ne veux pas le croire.
Combien de tous ses nouveaux acheteurs, de ses nouveaux abonnés avaient même entendu parler de ce journal. Combien l’avaient déjà acheté ? Combien l’avait même lu ?
Qui se soucie des autres publications en grande difficulté financière ? Qui se soucie des associations moribondes pour certaines, privées des subventions qui leur permettaient d’aider les plus démunis ?
L’apologie du terrorisme doit être sanctionnée tout comme le révisionnisme. Les lois qui encadrent ces comportements constituent un bastion pour notre civilisation. Dans ce cas, pas de liberté d’expression, c’est le choix de notre république.
En revanche, les différentes sensibilités concernant cet épisode dramatique de notre histoire ont le droit de s’exprimer elles-aussi. L’hypocrisie a le droit d’être démasquée sans pour autant attirer les foudres des bien-pensants de circonstance.
La sidération n’excuse pas tout. Surtout après que le soufflé soit retombé. La pensée libérée des débordements émotionnels peut recommencer à émettre des réflexions plus vastes, plus abouties, plus intelligentes.